Une diphtongue est une seule voyelle dont la prononciation évolue au cours de son émission; AU commence par le son [ a ] et se termine par [ u ] (fr. « ou ») prononcé plus faiblement et de façon moins vocalique, d’où une écriture phonétique qui peut être [ au ] ou [ aw ].
Le latin classique avait trois diphtongues, AE, OE, AU. En latin populaire AE était devenu [ ɛ ], OE était devenu [ e ]. Seule AU était conservée, elle a ensuite disparu dans la plupart des parlers romans où elle est devenue [ ɔ ] ou [ o ] ; mais elle est conservée en occitan, rhéto-roman, le mozarabe l'avait également conservé pour partie.
Dans notre secteur, c’est ici aussi une des identités qui distinguent la zone occitane de la zone arpitane. AU est encore parfaitement conservé en occitan sigolénois (au moins pour la position tonique). En français et arpitan, AU est devenu O au V° siècle.
Voici quelques exemples du parler sigolénois : ücausa > chausa [ 'tsauzɔ ] « chose », üpaucu > pauc [ pau ] « peu », üclaudere > claure [ 'klauʀ(ø) ] « clore, mettre en parc », üaura > aura [ 'auʀ(ɔ) ] « vent », repaus [ ʀø'pau ] « repos », lausa « lauze » (le mot français est ici pris à l'occitan).
aura est le mot couramment utilisé à Sainte-Sigolène pour désigner le vent de façon général, tandis que vent est principalement le vent du midi, les autres vents sont la bisa « bise, vent du nord », l’auvernhassa « l’auvergnate, qui vient d’Auvergne, vent d’ouest ». On dit en particulier: Las auras se batan [ laz’auʀa sø’bat ] « les vents se battent » (il y a des turbulences atmosphériques), aquò fai d’aura [ kɔ fi'dauʀ(ɔ) ] « il fait du vent ».
Nous verrons plus tard que l'articulation de AU, comme celle de l'ensemble des diphtongues, est différente selon qu'il s'agit d'une prononciation tonique ou d'une prononciation atone. En position tonique, c'est toujours [ au ] mais en position atone c'est le plus souvent [ u ], avec parfois maintien de A faiblement articulé.
AU a pu être également formé par effacement d'une consonne : üfagu > fau « hêtre », üvadu > vau « je vais », üparabula > paraula ou même par vocalisation d'une consonne, que ce soit très tôt üsagma > sauma « ânesse », ou bien plus tard üclave > clau « clé », naut « haut », autre « autre », chaud « chaud », …., il est également prononcé AU en zone occitane, O en zone francoprovençale.
La conservation de AU en occitan a parfois pour conséquence que la consonne qui suit n’a pas le traitement intervocalique : jauta [ ’dzautɔ ] « joue », nauta [ ’nautɔ ] « noue » (mot qui reste dans la microtoponymie).
Auteur: Didier Grange - 2014- modifié- 2021 / [ Télécharger l'ouvrage ]
Quelques notions de phonétique articulatoire
Le système vocalique du roman occidental
Palatalisation de C et de G devant E et I (première palatalisation)
Sonorisation des consonnes intervocaliques sourdes
Palatalisation de C et de G devant A (segonde palatalisation)
Effacement des voyelles finales E et O
Effacement des voyelles posstoniques
Affaiblissement de B intervocalique
Affaiblissement de D intervocalique
Affaiblissement de DH intervocalique
Affaiblissement de G intervocalique
Effacement de N instable en fin de mot
La diphtongaison de È et de Ò en roman I
La diphtongaison de E et de O en roman II
La diphtongaison de È et de Ò en roman III
Formation de U antérieur, fermeture de O ( Ụ )
Le système vocalique sigolénois
Séparation de A antérieur et de A postérieur
Simplification des triphtongues
Effacement des consonnes finales
Consonantification des voyelles
Les articles et pronoms démonstratifs