Le nom de ce village présente un curiosité, nous avons deux façons de le nommer, d’une part « au Pinet » [ pi’ne ], et d’autre part « à Pine » [ pin ]. Indiquons qu’en patois sigolénois, il me semble qu’il y a hésitation entre [ ve pi’nø ] et [ ve ’pinø ]. C’est l’occasion ici d’indiquer que l’usage est de systématiquement annoncer les noms de villages avec (v)ès, ce village étant alors désigné vès Pine(t) ou ès Pine(t) (1).
L’origine du mot est le latin pinetu « forêt de pins », qui donnera donc l’occitan pinet dont la forme est piné pour l’occitan vivaro-alpin (2), mais qui est également à l’origine de pineda, pinea. On fera attention à ne pas y voir le suffixe -ittu : dans un cas, le suffixe E(T) issu de -etu est un collectif, tandis que dans l’autre cas, ET issu de -ittu est un diminutif. Ce collectif E(T) est particulièrement utilisé pour les plantes, dont les arbres, mais il n’est plus productif depuis de Moyen-Age où la variante féminine E(D)A s’est généralisée (3).
Venons-en aux deux variantes francisées, « Pine » et « Pinet », c’est-à-dire [ pin ] et [ pi’ne ]. Pour comprendre ces deux variantes, il faut nécessairement traiter des évolutions phonétiques propres aux parlers de notre région. Il se trouve qu’au nord du département de la Haute-Loire, la prononciation de E [ é ] est devenue anciennement [ ø ], et c’est ici la clé de la transition de piné [ pi’nø ] à pine [ ‘pinø ]. On doit supposer que, quand il s’est agi de franciser le nom du village, on a créé la forme [ ‘pinø ] dans la mesure où le schéma phonétique français n'offre que la position atone pour [ ø ] / [ ɘ ]. On aurait ainsi eu un premier registre francisé avec « Pine » [ ‘pinø ], devenu [ pin ]. Ce n’est que plus récemment qu’a du apparaître une nouvelle innovation [ pi’ne ] sur la base de la forme écrite « Pinet » .
On appelle les habitants du Pinet, les « pinatous », c’est à dire les « pins ».
Pour finir par une anecdote, nous irons à Madagascar retrouver les traces de ce Pinet sigolénois, en suivant Jean-Marie Grangette, né en 1872 au Pinet selon son acte de naissance, ou né à Pine suivant le Journal officiel de Madagascar et dépendances, du 31 octobre 1914.
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(1)
Vous pouvez entendre ici la voix de Michel Boyer prononçant ès
Pine(t) ,
il s’agit d’un extrait de son ouvrage « Un
braconaire ès Golena »
mas,
poguèran pas rapir vès Pinet. "Mais,
ils ne purent pas monter au Pinet »
Vous pouvez entendre plus longuement Michel Boyer dans l'enregistrement proposé ici.
(2) Pinei en franco-provençal, français « Pinay »
(3) Jean-Pierre Chambon, in : Estudis Romànics 36, 2014g, 373-381
Auteur: Didier Grange - 2020,2021,2022,2023
Santa-Segolena: 'Sainte-Sigolène '
La meira : ‘La grand mere’, ‘le meyrat’
La malautèira : ‘La malouteyre’
Pra(t) de l’òia : ‘Pré de Loye’
Pueibrau : ‘Pébrau’, ‘Peybraud’
Pont soteira(n) : ‘Pont souteyrat’
Lo vial, la viala : ‘la vialle’
Las sèrvias : ‘Les servies’, ‘la servia’
Licha-Mealha: ‘Lichemiaille’, 'Lichemaille'
Peirelaa, Peiralaa : ‘Peyrelas’